Piloter une 2CV en course sur terre : immersion dans le 2CV Cross
Par RobinB le 19 août 2025 Kartcross / Autocross RallycrossLe sport automobile regorge de disciplines spectaculaires qui restent accessibles sans dépenser une fortune. Parmi elles, le 2CV Cross occupe une place à part. Mélange de tradition populaire, d’ambiance paddock conviviale et de pilotage sur terre exigeant, cette catégorie aujourd’hui l’un des meilleurs rapports coût / plaisir / spectacle du sport auto 👌
Accessible dès 16 ans, aussi bien en Coupe de France FFSA qu’en 2CV Top Cross UFOLEP, la discipline séduit autant les jeunes qui découvrent la compétition que des passionnés aguerris qui roulent pour le plaisir depuis parfois plusieurs décennies 😲

ℹ️ Dans cet article, nous allons plonger dans l’univers du 2CV Cross : de ses origines aux règles qui encadrent la catégorie, en passant par la préparation des voitures — moteur 602 cm³ d’origine, boîte courte de 2CV4 avec couple conique 8/33, châssis renforcé, arceau 6 points —, les circuits et le calendrier, les budgets pour rouler et les différences entre la filière officielle FFSA et le 2CV Top Cross organisé en UFOLEP.
Des raids aux pistes en terre : la naissance du 2CV Cross
L’histoire du 2CV Cross commence au tout début des années 1970, dans la foulée des grands raids organisés par Citroën pour démontrer la robustesse et la simplicité de sa petite berline. En 1970, c’est le Paris–Kaboul ; en 1971, le Paris–Persépolis. Les images de 2CV franchissant des pistes improbables, chargées de bagages et de poussière, font rêver toute une génération. Ces expéditions prouvent que la modeste Citroën peut encaisser des milliers de kilomètres dans des conditions extrêmes… sans jamais vraiment atteindre ses limites 💪

En 1972, alors qu’un nouveau raid africain est prévu mais repoussé à l’année suivante, l’idée germe de recréer en France l’ambiance de ces aventures. Jacques Wolgensinger, directeur des relations publiques de Citroën, imagine une épreuve sur terre qui mettrait le 2CV à l’épreuve tout en restant accessible. Avec le photographe Alain Beauvais, ancien participant au Paris–Kaboul, il repère une carrière de sable désaffectée au Pêchereau, près d’Argenton-sur-Creuse 🔎
L’objectif : inventer une course d’endurance de 24 heures, inspirée du Mans mais adaptée à l’esprit de la 2CV. Citroën saisit l’opportunité, établit un règlement validé par la Fédération française du sport automobile et convie les anciens participants des raids 1970 et 1971 🥳
24 heures 2CV de 1972 - Trois catégories selon la cylindrée ⚙️
- 425 cm³ (avant août 1967)
- 425 et 435 cm³ (après août 1967)
- 602 cm³ pour les 2CV, Dyane et Méhari
Les 22 et 23 juillet 1972, le tout premier Pop’Cross – nom donné à l’épreuve – se déroule sur le circuit en terre de La Fonteneuille. 74 voitures (2CV, Dyane, Méhari) spécialement préparées prennent le départ, pilotées uniquement par des jeunes de moins de 30 ans. Les courses se font par groupes éliminatoires, de jour comme de nuit, avec une vitesse de pointe frôlant les 70 km/h. Le règlement impose déjà arceau et casque, signe que la sécurité est prise au sérieux.

Le public répond présent : près de 30 000 spectateurs assistent à l’événement, retransmis en direct sur RTL 😱
🏆 La victoire revient à Jean-Claude Mouret, 23 ans, apprenti mécanicien de Mézières-en-Brenne, qui remporte une 2CV 6 orange spécialement équipée pour le raid africain 1973. On croise aussi un certain Rémy Cordebar, qui transmettra plus tard le virus à ses quatre frères… et à son père, alors âgé de 70 ans.
Le succès est tel que dès 1973, trois nouvelles épreuves sont organisées. En 1974, on en compte déjà sept, avec un championnat national soutenu par Total et Michelin. En 1975, le format devient international avec 17 épreuves dans 5 pays et pas moins de 630 concurrents. On atteindra même 19 000 spectateurs sur certains week-ends et jusqu’à 800 participants sur une saison complète. Un énorme succès ! 😎
Les années 1980 et 1990 constituent l’âge d’or, avec plus de 140 pilotes réguliers chaque année. Des figures comme André Toton (président de 1982 à 1998) puis Joël Cruchet (jusqu’en 2016) modernisent la discipline, avec notamment l’arrivée des transpondeurs et un rapprochement avec la FFSA via la commission “2CV Cross / Fol’Car”. Depuis 2016, le groupement est présidé par Julien Desaché.
🔗 Voir le site officiel du Groupement 2CV cross France
Même si la crise sanitaire a réduit les effectifs, le 2CV Cross conserve ce qui a fait son succès : une ambiance conviviale, un esprit populaire et un spectacle authentique, où la petite Citroën continue de prouver qu’elle n’a rien perdu de son endurance 👍
Comment se déroule une course de 2CV Cross ?

Des 2CV s’affrontent en peloton, ailes contre ailes, soulevant des nuages de poussière et rugissant dans un vacarme qui, autrefois libre et tonitruant, est aujourd’hui encadré par la réglementation sur le bruit. Finis les échappements totalement libres : les voitures doivent désormais être équipées de silencieux pour ne pas dépasser 100 dB. Et quand on dit “peloton”, on ne parle pas de six ou huit voitures comme en rallycross : en 2CV Cross, les finales A et B rassemblent 25 voitures au départ, offrant un spectacle impressionnant avec des grilles pleines et un trafic constant en piste 🔥
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Aujourd’hui, l’organisation des courses est coordonnée par le Groupement National des Organisateurs de 2CV Cross, qui veille au respect des règlements et fournit toutes les informations aux pilotes et équipes pour préparer une voiture conforme 📜
Les épreuves se déroulent sur des circuits en terre, souvent des pistes dédiées ou des tracés de rallycross. Le programme s’étale généralement sur une ou deux journées, selon le nombre d’engagés :
- Deux jours : c’est la formule retenue quand la grille dépasse 50 pilotes.
- Une journée : possible si les inscrits sont moins nombreux, tout en conservant les phases essentielles.

Le format type fixé par le règlement
- Essais libres pour prendre ses marques sur la piste.
- Essais chronométrés pour établir les grilles de départ.
- Trois manches qualificatives de 8 tours, qui attribuent des points pour déterminer l’accès aux phases finales.
- Courses féminines et/ou débutants (8 tours), facultatives mais encouragées pour promouvoir la discipline.
- Deux demi-finales de 12 tours, réservées aux 50 meilleurs des qualifications.
- Finale B (10 tours)
- Finale A (15 tours), qui détermine le vainqueur de l’épreuve
- Éventuellement, une Finale C (8 tours) dite “consolante”, pour ceux qui n’ont pas pu se qualifier plus haut
Même à 100 km/h maximum, l’action est intense. Les dépassements au freinage dans les virages serrés, les glissades spectaculaires et les contacts inévitables — mais régulés par les commissaires — font partie du spectacle 🎉

Les spectateurs, souvent postés en hauteur, peuvent voir la quasi-totalité du tracé et profiter d’une ambiance à la fois familiale et survoltée. Dans le paddock, la convivialité est la règle : il n’est pas rare de voir deux concurrents, capot ouvert, refaire un moteur sur une bâche à même l’herbe pendant qu’un voisin apporte à boire… et un pilote fraîchement accidenté se faire aider par ses rivaux pour repartir. Cette entraide, presque “à l’ancienne”, tranche avec l’ambiance plus tendue que l’on retrouve parfois dans d’autres disciplines, et contribue au charme unique du 2CV Cross 🥰
Fiche technique et préparation d’une 2CV Cross
Le règlement est sans ambiguïté : le 2CV Cross reste une 2CV ou une Dyane, avec mécanique d’origine. Le moteur est le fameux bicylindre 602 cm³ d’environ 29 ch DIN, refroidi par air. La boîte, quant à elle, doit obligatoirement être celle d’une 2CV 4 équipée du couple conique 8/33.

Le blocage de différentiel est interdit, même partiel, et les cotes constructeur doivent être respectées. Toute modification visant à gagner des chevaux est proscrite : pas question de polir les conduits, de toucher au diamètre des soupapes ou d’alléger les pièces mobiles. Même les additifs dans l’huile ou l’essence sont interdits. Cette rigueur technique permet de conserver des coûts bas et d’éviter la “course à l’armement” qui plombe souvent d’autres championnats 😒
Cette contrainte monotype garantit une équité technique et évite l’escalade des coûts que l’on retrouve dans d’autres disciplines 💸
Côté transmission et châssis, certaines améliorations sont permises pour la fiabilité : renforts de la commande de boîte, du support élastique arrière, ou encore des points de fixation. Les freins peuvent être à disque ou à tambour selon la configuration d’origine.
La carrosserie, elle, est largement allégée : suppression des portières arrière, de la capote, des vitres remplacées par du grillage, et retrait de tous les accessoires inutiles. Les organes vitaux sont renforcés pour encaisser les chocs : châssis consolidé, train avant et arrière souvent issus d’Ami 8 ou d’Acadiane, amortisseurs spécifiques. La suspension, connue pour son confort “bateau” sur route, est durcie pour un comportement plus précis sur terre 😋

Dans la majorité des cas, les autos sont construites spécialement pour la compétition à partir d’un châssis d’Ami 8, réputé plus robuste que celui d’origine, puis raccourci pour s’adapter à une caisse de 2CV ou Dyane. Les pots de suspension, souvent issus de l’Acadiane, permettent d’abaisser la garde au sol à environ 12 cm à l’avant et 13 cm à l’arrière, ce qui rend l’auto plus incisive et favorise la dérive de l’arrière au lever de pied. Les amortisseurs autorisés sont limités à certains modèles (Gabriel à huile ou Bilstein à gaz). Certains pilotes ajustent même la hauteur roue par roue pour compenser leur poids, afin que la voiture soit parfaitement à plat une fois à bord 👌
La sécurité est un point central : arceau-cage 6 points soudé, toit rigide, siège baquet homologué, harnais FIA 4 ou 6 points en 3 pouces avec boucle aviation, coupe-circuit… Même si la vitesse de pointe dépasse rarement les 100 km/h, les tonneaux et les chocs latéraux font partie du jeu, et la réglementation impose un niveau de protection comparable à d’autres disciplines FFSA.
Les pneus sont également encadrés par une liste officielle mise à jour chaque saison. On y trouve par exemple des modèles Hankook (K715, W442, W452), Firestone F560, Tracmax et Tristar. Cette limitation évite toute course à l’armement et permet de maîtriser le budget pneumatique tout en garantissant des performances similaires entre concurrents.
[VIDEO 🎥] 2CV Cross - Départs, contacts et bagarres en piste 🥵
FFSA et UFOLEP : deux filières, deux ambiances
Aujourd’hui, la compétition sur circuit terre en 2CV se pratique sous deux bannières :
- la FFSA (Fédération Française du Sport Automobile), qui encadre la Coupe de France de 2CV Cross ;
- l’UFOLEP (Union Française des Œuvres Laïques d’Éducation Physique), où la catégorie “2CV Top Cross” est intégrée aux épreuves de Poursuite sur Terre.
En FFSA, on est dans la filière officielle, avec un calendrier national, un règlement technique et sportif strict, et des plateaux souvent bien remplis. La licence requise est une licence régionale terre (ou un titre de participation), accessible dès 16 ans, et les coûts d’engagement restent très abordables, autour de 75 € par course.

En UFOLEP, la discipline existe surtout à l’échelle régionale, avec un format identique sur le plan technique puisque le règlement reprend celui de la FFSA (moteur 602 cm³, boîte de 2CV 4 avec couple conique 8/33, liste de pneus homologués, sécurité). La différence se joue surtout sur l’organisation : un calendrier plus localisé et une ambiance très associative. Les jeunes de 16 à 18 ans sont admis mais doivent valider un Certificat d’Aptitude Automobile (C.A.A.) avant de participer.
En résumé :
- FFSA : filière nationale, forte participation, visibilité plus large.
- UFOLEP : même règlement technique, cadre plus local et associatif.
2CV Cross - Les circuits et le calendrier FFSA
La Coupe de France de 2CV Cross FFSA se dispute sur un calendrier annuel de 7 à 10 épreuves (8 épreuves en 2025), réparties dans différentes régions, ce qui permet à la discipline de toucher un public varié. Les pistes sont presque toutes en terre, parfois partagées avec le rallycross ou utilisées ponctuellement par d’autres disciplines tout-terrain.
📅 Calendrier 2025 - Coupe de France de 2CV Cross
- Pont-de-Ruan / Saché (Indre-et-Loire) : étape d’ouverture dans un cadre vallonné au cœur de la Touraine.
- Elne (Pyrénées-Orientales) : au pied des Albères, tracé ensoleillé et rapide, baigné d’ambiance méditerranéenne.
- Sougy (Loiret) : circuit technique accueillant généralement deux manches dans l’année.
- Laon (Aisne) : piste historique avec des plateaux fournis et un public fidèle.
- Servilly (Allier) : rendez-vous estival partagé avec le Fol’Car.
- Allogny (Cher) : étape de septembre, souvent décisive pour le championnat.
- Châteauroux – Saint-Maur (Indre) : souvent choisie pour accueillir la finale, avec des infrastructures adaptées à un grand public.
Une particularité du 2CV Cross est que la grande majorité des week-ends sont partagés avec le Fol’Car. Cette cohabitation permet de mutualiser l’organisation et les infrastructures (commissaires, secours, stands) tout en offrant au public un programme varié. Sur une même journée, on peut ainsi voir s’enchaîner les pelotons serrés de 2CV Cross et les départs tout aussi spectaculaires du Fol’Car 🤪
En 2025, le calendrier conserve cet équilibre entre étapes “historiques” et rendez-vous plus récents, assurant à la discipline une présence régulière dans le paysage du sport auto régional et national.
Les budgets pour faire de la compétition en 2CV Cross
C’est sans doute la question la plus posée par ceux qui s’intéressent au 2CV Cross. Le coût d’entrée reste l’un des principaux atouts de la discipline, mais il varie selon que l’on opte pour une voiture prête à courir ou pour une préparation à partir d’une base.

Achat d’occasion
La solution la plus rapide consiste à acheter une 2CV Cross d'occasion déjà prête à rouler. Ces voitures se trouvent généralement par le bouche-à-oreille, dans les paddocks ou via des groupes spécialisés sur les réseaux sociaux. Vous pouvez également consulter les petites annonces de voitures de course sur GoToTheGrid. Les prix s’échelonnent en moyenne entre 3 000 et 6 000 € pour une auto prête à rouler et dans un état correct. Bien entendu, le prix dépendra de l’état général de la voiture, de la fraîcheur de la mécanique, de la conformité de l’arceau, qui doit être impeccable et répondre au règlement, ainsi que des pièces fournies (pneus, trains, boîtes de rechange…).
ℹ️ D'après quelques spécialistes de la catégorie, le prix d'une auto capable de jouer la gagne peut (vite) dépasser les 5 000€ 💰
Construction d'une voiture
Pour ceux disposant de compétences en mécanique, il est possible de partir d’une 2CV ou Dyane d’occasion en état moyen, souvent accessible pour des sommes raisonnables. Il faut ensuite installer un arceau homologué, renforcer le châssis, monter un siège baquet et un harnais FIA, préparer les trains roulants et se conformer au règlement technique.
Il est en revanche vivement déconseillé de partir d’un exemplaire de série en bon état ou restauré : sur le marché actuel, une 2CV d’origine bien conservée dépasse facilement 10 000 €, et les modèles les plus recherchés peuvent franchir la barre des 15 000 €. Investir ces montants pour ensuite la malmener sur un circuit de terre serait un véritable gâchis 😁
ℹ️ Pour construire une 2CV Cross, les pilotes utilisent des caisses et pièces de carrosserie qui seraient inutilisables en restauration, là où les restaurateurs utilisent des pièces de refabrication
Location d'une voiture
Certaines équipes proposent des formules “arrive & drive” comprenant la voiture, le transport, l’assistance, les pneus, l’essence et parfois un accompagnement au pilotage. Le tarif moyen se situe autour de 1 000 € pour un week-end complet (hors casse).
À ce budget d’achat ou de location s’ajoutent bien sûr les frais indispensables pour rouler toute une saison : licence, engagements, pneus réglementaires, entretien courant et pièces de rechange, mais aussi les déplacements sur les circuits. En optimisant la préparation et la gestion des pièces, il est possible de disputer une saison complète avec un budget annuel compris entre 3 000 et 5 000 €, ce qui reste l’un des rapports coût/sensations les plus intéressants du sport automobile 🙂
Pourquoi essayer la compétition en 2CV ?

Le 2CV Cross, c’est tout sauf lent ou monotone. Certes, la vitesse de pointe reste modeste, mais la légèreté de la voiture, son comportement joueur sur la terre et la densité du peloton en font une discipline très spectaculaire.
Le public, lui, se régale : nuages de poussière, contacts “rugbystiques” mais contrôlés, et une ambiance toujours bon enfant.
Dans les zones d’assistance, on discute entre concurrents, on échange des pièces, on aide même un adversaire à repartir après un accrochage. Cette entraide sincère, dans un esprit old school, est l’une des raisons qui poussent de nombreux pilotes à revenir saison après saison.
Sur la piste, le 2CV Cross est aussi une véritable école de pilotage : lecture du terrain, maîtrise des transferts de masse, gestion du trafic… autant de compétences utiles dans toutes les disciplines du sport auto.
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Conclusion

Le 2CV Cross reste un monument du sport automobile populaire français. Né d’un pari un peu fou au début des années 1970, cette catégorie a traversé les décennies en conservant son esprit d’origine : accessible, conviviale et diablement fun. Que l’on choisisse la filière FFSA avec son championnat national structuré ou la version UFOLEP, chacun peut y trouver son compte. Avec un budget encore raisonnable, une ambiance unique et des sensations brutes, c’est une discipline qui mérite d’être vécue au moins une fois. Et qui sait ? Une première course pourrait bien être le début d’une longue histoire… 😎
📸 Un grand merci à Morgane Lebrun pour ses superbes photos qui illustrent cet article, utilisées avec son accord. ➡️ Découvrez son travail ici.